Philippe Col : « La Coupe d'Europe ? Un souvenir intarissable »
Il y était ! Philippe Col fait parti de ce PSG cuvée 81/82, celui qui remporta le premier trophée de l'histoire du club un soir de mai 1982, celui qui souleva pour la première fois la Coupe de France, devant le grand Saint-Etienne de Rep, Platini et Battiston. Titulaire pour cette finale d'anthologie, il garde intact ses souvenirs passés dans le club de la capitale.
Philippe Col : Je jouais dans le tout petit club de l'US Nanterre, jusqu'en cadet deuxième année, mais je jouais avec l'équipe seniors. J'étais dans une école privée, au lycée Passy-Buzinval à Rueil-Malmaison avec laquelle je jouais au foot. C'est un lycée très haut de gamme tenue par des frères et des pères dans lequel il y avait les fils de Gisacrd d'Estaing. Avec l'équipe de foot, nous avons rencontré l'équipe minime du PSG entraînée à l'époque par Jean Djorkaeff. Nous avons fait 3-3. J'ai été sollicité, avec 4 joueurs de mon équipe pour venir au PSG, mais j'ai refusé, j'ai voulu rester à l'école car c'était trop compliqué pour moi, étant pensionnaire.
Un jour, une personne de l'école, l'Abbé Fontenau m'a inscrit au concours d'entrée à l'INF Vichy qui venait de se lancer. A la session sur Paris, il y avait 150 joueurs. J'ai été admis à la session finale à Vichy, avec deux autres joueurs du Red Star et du Paris FC. Moi, j'étais le petit amateur de l'US Nanterre. Nous sommes allé là bas sans aucune prétention, c'était l'occasion de faire un petit stage. Il y avait tous les meilleurs jeunes de France qui jouaient à Nice, à Marseille ou à Monaco. On était plus de 200 en tout. Les organisateurs ne comprenaient pas bien ce que je faisais là en venant de l'US Nanterre…Je suis resté plusieurs jours et j'ai été retenu parmi les 40 joueurs qui allaient intégrer la prochaine promotion de l'INF.
La formation s'établissait sur deux ans. Entre temps, avant même que je signe à l'INF, le Red Star m'avait contacté, et je leur avais promis que je viendrai à l'issue de ma formation à Vichy. J'ai refusé la troisième année qu'ils me proposaient à l'INF pour venir au Red Star. J'avais terminé meilleur buteur et nous avions même gagné le tournoi d'Alès en finale contre le Real Madrid. Je suis donc allé au Red Star entraîné par Roger Lemerre en 1975 Je me suis directement imposé dans l'équipe première en tant qu'attaquant titulaire avec Roger Magnusson et George Eo. Au bout de 14 matches, j'ai été relégué en réserve, sans aucune explication. Je trouvais cela injuste mais je n'ai rien dit. Au bout de trois matches en réserve, on m'a appris que si j'avais été écarté de l'équipe première c'est qu'à partir du moment où un joueur jouait 15 matches, il devait être payé comme un professionnel, c'est-à-dire 7500 Francs. Ils m'ont fait faire 14 matches pour que je ne sois pas payé comme tel. Je gagnais a l'époque 450 Francs. Le comble de l'ironie est que nous avons rencontré mes anciens collègues de troisième année de l'INF avec la réserve du Red Star et je me suis blessé le genou. J'ai été blessé 6 mois et n'ai jamais pu jouer ce fameux 15ème match.
PSG70 : Mais vous étiez plutôt défenseur au PSG ?
P.C : Oui, j'ai été reconverti défenseur latéral. A l'issue de la saison, Roger Lemerre m'a demandé si je voulais occuper ce poste. André Merelle et Jean-Claude Bras les latéraux quittaient le club. Il m'a dit que je pouvais facilement m'adapter. J'ai accepté et j'ai joué deux saisons sans rater un match à ce poste avec le Red Star. Au bout de deux ans, Francis Borelli le président du PSG qui me voulait est venu trouver Lemerre pour lui dire qu'il voulait deux de ses joueurs, moi et Patrice Lecornu. Le Red Star était à la limite du dépôt de bilan, mais Lemerre a tout de même refusé l'offre, en espérant que le club se relève. Borelli a donc décidé de faire venir le niçois Douis comme latéral offensif, et je suis resté au Red Star. Mais un mois plus tard, le club déposait effectivement le bilan. Borelli est venu me chercher mais ne m'offrait plus le même salaire qu'au départ. Au lieu des 12 000 Francs qu'il a finalement donné à Douis, j'ai eu 4500 Francs. J'ai tout de même accepté l'offre. L'idée de jouer pour le PSG était plus forte. Mais sans ces coïncidences, j'aurais pu avoir un passage plus lucratif au PSG. Même si les 5 ans que j'ai passé ont été exceptionnelles.
PSG70 : En 1983, après 5 saisons au PSG vous quittez la capitale pour Toulon alors que vous étiez titulaire. Pourquoi ce choix ?
P.C : J'ai fait le mauvais choix en refusant de prolonger à Paris, Rolland Courbis était venu me chercher pour jouer à Toulon. Je suis resté un an. Mais dans le sud, tout n'est pas très très légal si je puis dire… Au bout d'un an, ils ont voulu que je parte car ils avaient fait un recrutement très onéreux avec Casoni et Olmeta. Leurs arrivées doublaient quasiment la masse salariale. Moi, j'avais encore deux ans de contrat, etil était inenvisageable que je parte. Mais j'ai reçu des pressions, j'ai eu peur. Je n'étais pas habitué à ce genre de pratiques. Et puis le FC Sète qui était ambitieux en D2 m'avait sollicité. Je suis donc parti là bas, mais très tard dans la saison. Quand vous signez en D2 à 30 ans, vous savez que vous ne reverrez pas la D1, sauf si vous montez avec votre club. On a failli le faire, mais on a raté la montée au goal average….face au Red Star de Roger Lemerre.
« La finale PSG-Saint-Etienne ? Tous ceux qui avaient lancés l'enregistrement du match sur leur magnétoscope n'ont pas pu voir la fin »
PSG70 : Quel souvenir gardez vous de la victoire en Coupe de France 1982 ?
P.C : En 1982 j'étais sur le terrain, titulaire, c'était une finale exceptionnelle. Surtout que j'avais été blessé, dans le plâtre deux mois auparavant. Je n'avais raté aucun match de la saison avant cette blessure. Mais je voulais jouer absolument la finale. On avait fait une super saison, je voulais être présent. C'était un match vraiment mémorable, fort en rebondissement. Tous ceux qui avaient lancés l'enregistrement du match sur leur magnétoscope n'ont pas pu voir la fin tellement ça a traîné en longueur. Entre l'envahissement du terrain, le but de Rocheteau dans les dernières minutes puis la séance de tirs aux buts, c'était fabuleux. En 1983, j'étais en tribune, avec Fabrice d'RTL et notre attaquant Kees Kist. Nous allions tous les deux quitter le club. Je devais être titulaire, encore la veille au soir mais je n'ai finalement même pas été sur la feuille de match. Bathenay qui était claqué voulait jouer sa 5ème finale. Il a tout de même joué bandé, mais il est sorti au bout de 10 minutes…
PSG70 : Comment le premier match de l'histoire du club en coupe d'Europe contre Sofia a-t-il été vécu par les joueurs ?
P.C : Un souvenir fabuleux. C'était le premier match en Coupe d'Europe du club, une sorte de nouvelle aventure qui s'ouvrait au PSG. Nous avions un groupe de supporters fidèles qui nous suivait partout. Mais c'est difficile à expliquer comment ça a été ressenti par les joueurs. Enfant, on voit la Coupe d'Europe à la télé, d'un petit nuage. Alors lorsqu'on la joue réellement, c'est fantastique. Même si j'ai eu que trois tours (Lokomotiv Sofia, Swansea et Waterscheï) de coupe d'Europe, ça restera des souvenirs intarissables.
PSG70 : Aviez-vous conscience à l'époque de participer à la "naissance d'une époque" ?
P.C : Oui, en quelque sorte. On sentait bien que c'était une nouvelle aire. On a gagné les premiers titres avec les coupes de France. Puis le titre de champion est arrivé quelques saisons plus tard.
PSG70 : Parmi tous les joueurs que vous avez pu côtoyer au PSG ou ailleurs, quel est celui qui vous a le plus impressionné ?
P.C : Roger Magnusson au Red Star. Un dribbleur phénoménal. Je l'ai vu jongler et mettre le ballon sur son dos devant un défenseur lors d'un match alors qu'il avait un genou à l'ouest. A Paris, les stars étaient Dahleb et Susic, deux grands joueurs.
« A Paris, les anciens ne sont pas assez valorisés»
PSG70 : Ne regrettez vous pas que l'on occulte souvent votre PSG, celui d'avant Canal + ?
P.C : Nous n'étions pas trop médiatisé à l'époque. On parlait que des grands joueurs comme Fernandez, Rocheteau ou Bathenay. Les autres n'étaient pas valorisés. Tous les matches ne passaient pas à la télé. Il n'y avait donc que les journaux pour relayer les performances. Et à l'époque, il était très courant de voir des erreurs dans les compositions ou buteurs relayées dans les journaux. Par exemple, lors du match en coupe d'Europe au Parc des Princes contre Swansea, tous mes coéquipiers m'avaient dit que j'avais fait un super match. J'avais été partout sur le terrain, très actif, j'avais même failli marquer…mais le lendemain, dans l'Equipe , j'avais deux lignes pendant que les autres en avaient 5. C'est aussi le fait que j'étais défenseur qui engendrait cela.
PSG70 : Pensez-vous que les anciens joueurs sont traités avec respect par le club ?
P.C : Je trouve dommage que le club n'a pas invité pas ceux qui ont gagnés la Coupe de France. A Marseille ou au PSG du temps de Borelli ça ne serait jamais arrivé. Je vois par exemple au Real, il y a une équipe d'anciens joueurs avec des masseurs et une valise de maillots. Pareil à l'OM ou le club des anciens « OM All Star » reçoit de l'argent de la part du club. A Paris, je trouve que les anciens ne sont pas assez valorisés. Il devrait y avoir une tribune réservée à nous dans laquelle nous pourrions venir quand nous le souhaitons, sans réserver.
PSG70 : Suivez vous toujours l'actualité du PSG et du Red Star ?
Oui, je suis fidèle aux deux clubs, je vais parfois au Parc avec mon fils qui est un grand supporter du PSG. Malgré le fait que je sois ami avec de nombreuses personnes dans le sud supporters de l'OM, dont Albert Emon, un ancien coéquipier, ma famille reste le PSG. Je joue d‘ailleurs encore lorsqu'on m'appel avec les anciens du club, ça permet de revoir les copains comme Bouba ou Pilorget.
PSG70 : Que pensez-vous de l'évolution du métier de footballeur, de la mentalité générale des joueurs d'aujourd'hui ?
Pour moi la différence est essentiellement financière. J'aurais aimé jouer aujourd'hui. Mon fils a même failli. Il a joué au Racing en -15 ans avec Saha puis au PSG en -17 ans avec Anelka, mais il s'est blessé. Aujourd'hui il y a un bizness. Certes la préparation physique est plus intense, ça se sent, notamment sur le plan musculaire, mais la mentalité n'a pas changé. Il y a toujours des joueurs qui ont l'amour du maillot et du football, mais aussi beaucoup de mercenaires, on le sait. Je pense que tout cela a basculé avec Lagardère puis Tapie. J'ai connu un petit peu cette période lorsque je suis passé de Toulon à Sète.
PSG70 : Qu'avez-vous fait depuis votre fin de carrière ?
Après ma carrière, je n'ai pas voulu intégrer le système traditionnel et devenir entraîneur de haut niveau en passant les diplômes. Cela induisait d'être très mobile. J'ai préféré privilégier la stabilité pour que mes enfants réussissent. Je me suis installé en région parisienne, à Rueil-Malmaison. J'ai été entraîneur joueur de deux clubs parisiens à Suresnes puis à Saint-Cloud puis j'ai travaillé en parallèle dans l'immobilier, mon autre passion. Je gère une agence depuis 5 ans à Rueil.
Propos recueillis par Maxime Pousset pour PSG70.free.fr et PlanetePSG.com. Merci à Philippe Col.